Droite clermontoise: l'abattoir de la discorde
Une décision municipale d’achat d’un terrain, destiné à un futur abattoir musulman, divise actuellement les anciens membres de la liste d’opposition à Clermont-Ferrand, « L’Avenir à grande vitesse » menée par Anne Courtillé. En tant qu’ancien colistier, j’aurais souhaité que la droite clermontoise lave son linge sale en famille. Mais puisque l’affaire a été portée sur la place publique par une lettre ouverte d’Annie Emery, que les conseillers municipaux Anne Courtillé et Jean-Pierre Brenas y ont répondu (voir les liens ci-dessous), je m’autorise à intervenir à mon tour dans le débat. J’examinerai la question sous deux angles : le fond de l’affaire et la polémique interne à la droite.
Fallait-il ou non approuver l’initiative municipale ? D’un point de vue libéral, à partir duquel j’ai pris l’habitude d’examiner les problèmes, l’argent public, « notre argent »,-comme aurait dit Jean-Jacques Servan-Schreiber- ne doit pas financer les projets privés, cultuels ou autres. Ce qui signifie, entre parenthèses, que les subventions ou aides diverses aux associations devraient être supprimées.
Il y a des exceptions à toute règle. Il est parfaitement admissible que la puissance publique relaie le marché lorsqu’il est défaillant dans un secteur, dans la mesure où cela apporte un service potentiel à tous les habitants. C’est ainsi que des municipalités, Cournon d’Auvergne étant du nombre, ont sauvegardé leur dernière salle de cinéma. Mais lorsque le service s’adresse seulement à une frange de la population, la communauté des croyants musulmans dans le cas qui nous préoccupe, le refus de subventionner s’applique.
Oui mais voilà, la règlementation française sur l’abattage des animaux est très contraignante : c’est un acte technique, ne pouvant être pratiqué que dans un abattoir, même s’il est rituel et festif (1). L’officiant doit être sacrificateur habilité. Le manque d’abattoirs peut donner lieu à des dérogations préfectorales. Mais, à plusieurs reprises, les sites dérogatoires ont été fermés, après condamnation par le Conseil d’état, d’où retour à la case départ et recours, à nouveau, aux pratiques illégales. Les usines à gaz étatiques ne servent pas à régler les problèmes mais à pourrir la vie des membres de la société civile. C’est la raison pour laquelle l’intervention facilitatrice des responsables locaux peut être admise dans ce cas, à condition que la communauté musulmane, à travers ses associations représentatives, paie une juste contribution pour la location du terrain et (ou) des locaux. En aucun cas, le contribuable ne doit être lésé (2). Le vote favorable des conseillers municipaux d’opposition menés par Anne Courtillé n’est donc pas condamnable à mes yeux.
Reste, dans cette affaire, que le dossier municipal paraît incomplet, bâti à la va-vite, comme c’est, hélas! habituel sous la gouvernance Godard. Aussi ce vote oui, émis par nos amis, s’il se justifie, ne doit pas valoir un blanc seing à n’importe quoi. La vigilance s’impose pour la suite.
J’en arrive à l’autre question, interne à notre équipe municipale de 2008. Il faut savoir que les colistiers ont pris l’habitude de travailler avec les six élus avant chaque conseil municipal, pour réfléchir aux sujets soumis à discussion et vote. Pourquoi, à propos de l’achat de ce terrain, les conseillers municipaux ont-ils voté oui au Conseil municipal après avoir pris l’engagement de voter non en réunion préparatoire, selon les dires d’Annie Emery(3)? Je pense que tout élu doit garder sa liberté de vote et donc pouvoir changer d’avis sur un projet, à la lumière d’informations données par le maire en Conseil municipal. A condition de s’en expliquer ensuite à ses colistiers.
Or, je ne trouve pas de réponse à cette question précise sur ce revirement, dans les articles d’Anne et de Jean-Pierre Brenas dans leur site Internet. Je ne doute pas qu’ils puissent nous la fournir et j’attends leur réponse dans la sérénité. (voir mon article du 15 juillet: "Droite clermontoise et abattoir: une affaire qui fait "pschitt"). De plus, j’émets le souhait que, désormais, nous réglions nos affaires entre nous. Il n’est pas utile d’étaler publiquement nos divergences, ni nous livrer à des polémiques qui ne profiteront qu’à nos adversaires.
SW
La photo a été prise pendant la campagne municipale 2008. On reconnaît, de gauche à droite : J P Brenas, A Courtillé, A Emery.
(1) Au fait : l’abattage pratiqué sur la place de Super-Besse, lors de la Saint-Cochon, est-il règlementaire ?
(2) Tout cadeau caché, tout passe-droit avéré, tel un loyer anormalement bas, peut être sanctionné par la justice. Les exemples existent.
(3) Selon Annie Emery : « Il avait été décidé après une longue discussion que le vote de l’opposition serait : NON. L’argument majeur évoqué a été : l’argent public ne doit pas servir à favoriser des réalisation d’ordre strictement privé liées à tel ou tel culte. » Je ne participais pas à la réunion.
Lire :
La lettre ouverte d’Annie Emery :
http://www.modergnat.fr/index.php/2009/07/10/243-clermont-l-ump-divisee-sur-l-aid-el-kebir
Les réponses d’Anne Courtillé :
http://www.leclermontois.fr/spip.php?article635
Et de Jean-Pierre Brenas :
http://blog.jeanpierrebrenas.fr/post/2009/06/29/Sujet-a-polemiques-%3A