Un Américain bien tranquille
Jonathan Littell est l’un de nos meilleurs écrivains francophones. Pas de miracle à cela: il vécut en France jusqu’à l’âge de dix-huit ans, y passa avec succès le baccalauréat, avant de retourner aux USA, son pays d'origine, pour y continuer ses études. Il vient d’écrire, dans notre langue, et de publier un roman de près de neuf cents pages intitulé : «Les bienveillantes» qui rencontre un très grand succès public et pourrait être prochainement couronné par l’un de nos prix littéraires.
Pour l’anecdote, Littell demanda deux fois la nationalité française qui lui fut refusée «pour d’obscures raisons administratives», selon l’expression d’un de ses biographes. On peut, si on a l’esprit «mal tourné» de votre serviteur, trouver ces raisons dans le fait qu’il est Américain (ce qui est très mal vu en France contemporaine) et qu’il parle et écrit notre langue aussi bien qu’un académicien. Un postulant à la naturalisation parlant français, c’est louche, forcément louche.
Comme, hélas ! il n’est soutenu par aucune officine d’extrème gauche et que pas un de nos braillards patentés ne songe à manifester pour sa cause, l’affaire en reste là. Suggérons à Jonathan Littell, s’il veut toujours devenir l’un des nôtres, de contracter, s’il est célibataire, un mariage blanc dans une de nos trente six mille communes, ou, s’il est marié, d’engrosser sa femme et de la faire accoucher à Paris. Sa naturalisation lui tombera alors dans les mains, sans problème ni tracas, comme un fruit mûr.
Serge Weidmann
Consulter la biographie de J. Littell à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Littell