De la fiscalité française
J'ai laissé un certain nombre de commentaires à mes articles sans réponse. C'est pourquoi j'y reviens ce mois-ci, sous la forme d'autres articles, dans la mesure où les commentaires de mes lecteurs appellent une mise au point, une précision, un développement (1).
A propos du départ de Johnny Hallyday en Suisse, j'ai abordé le problème des impôts élevés en France, dont l'ISF n'est qu'un aspect particulier. Véritable hymne à une société libérale, en même temps que garde-fou légal à l'expansion étatique, la déclaration des Droits de l'Homme de 1789, précise, dans son article 13: "Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable: elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés." Dans l'esprit des constituants de ce temps-là, l'impôt n'était qu'une contribution nécessaire, qui devait permettre à l'Etat d'assurer les fonctions qui ne pouvaient être assurées qu'au niveau national, selon un principe de subsidiarité bien compris: l'armée, la police, l'administration (exécutive, judiciaire, pénale). On en est loin 217 ans après.
Avec des prélèvements obligatoires atteignant 44% du PIB, soit 53% du revenu national, la France actuelle entre dans le guinness des records pour les pays occidentaux (l'OCDE est en moyenne à 36% du PIB, l'Europe à 38% du PIB). Chacun d'entre nous a une notion personnelle du seuil au-delà duquel la ponction étatique devient spoliation, mais, quand la majorité des habitants travaille pour l'Etat six mois et demi par an, on peut estimer que ce seuil est largement dépassé. Et quand un particulier se voit privé, comme Johnny Hallyday, de 60% des fruits de son travail, on comprend qu'il aille voler vers des cieux plus cléments pour son portefeuille.
Les effets pervers d'une fiscalité lourde sur le travail, l'épargne, la consommation, les successions… sont connus. Elle incite à moins travailler, à épargner moins, à consommer prudemment, et, quand on le peut, à aller voir ailleurs.
La fiscalité augmente parce que l'intervention étatique, parée de la vertu redistributive, est de plus en plus importante et s'étend vers des domaines de plus en plus nombreux et variés. S'il y va de notre argent, il y va aussi de notre liberté d'action. Cette activité étatique débordante –augmentée aujourd'hui de celle du "millefeuille" territorial- entraîne lourdeurs, gaspillages, irresponsabilité, inflation règlementaire. Ceci n'est pas notre propos dans cet article. Néanmoins, il faut être conscient qu'une baisse de la fiscalité en France ne pourra être significative que quand l'Etat reculera et cessera de s'occuper de tout.
Quant à l'ISF, qui représente moins de 1,5% de la totalité des recettes des impôts, c'est une invention idiote. Parce qu'il est contre-productif: il fait fuir les riches à l'étranger lesquels, comme dirait Monsieur de La Palice, ne paient alors plus rien en France: ni TVA sur les produits, ni impôts sur le revenu, ni impôts sur l'épargne, ni impôts locaux. L'ISF est, en plus, injuste (effet pervers non prévu par le législateur) car il met sur la paille de modestes retraités qui ont le tort d'être propriétaires de terrains agricoles là où leurs prix flambent à cause de la demande touristique. Supprimons donc l'ISF.
Serge Weidmann
(1) Depuis quelques jours, j'ai décidé de ne plus mettre en ligne les commentaires qui, à la fois, ne sont rien d'autre que des mouvements d'humeur ou des attaques personnelles (ce qui ne fait pas avancer le débat) et dont les auteurs sont assez pleutres pour indiquer une adresse mel bidon.