Une éruption populaire

Il est toujours difficile de donner, à chaud, des avis sur le résultat d’une élection. C’est pourtant ce que je vais tenter  de faire après cette élection référendaire pour le traité constitutionnel européen.

Le peuple français s’est exprimé en masse (près de 70%) et sans équivoque ( 54,50% en faveur du non ).

Ce qu’il nous dit, selon moi, c’est que la démocratie est en crise. L’Europe , dans toute sa splendeur reconnue par les élites, est un brouillard pour l’homme de la rue.

Certes, la situation nationale est catastrophique et  l’Europe n’y est pour rien. Mais le gouvernement Raffarin y est pour quelque chose, comme le gouvernement Jospin y était pour quelque chose en 2002. Or, les promoteurs de ces politiques, qui ont échoué, sont justement ceux qui appelaient à voter « oui ».

La politique du cul entre deux chaises, chère à nos européens socio-démocrates de droite et de gauche : libéral à Bruxelles, jacobin à Paris, a connu son terme voire son terminus ce soir.

« Il suffit » ont dit les français.

Que doivent faire les élites en démocratie quand le peuple a parlé et de cette façon ? Changer de peuple ou s’interroger sur la pertinence de leur propre  action ?

Je leur conseille , très humblement, de faire leur auto-critique, d’écouter, à travers leurs représentants locaux, les obscurs et les sans-grades de la République, autrement dit, de faire sortir leurs fonctionnaires de leur bureau pour écouter le peuple ou leurs représentants.

Je conseille aussi , ça ne mange pas de pain, aux élus et technocrates des collectivités dites territoriales de faire de même : leurs  emplettes à Auchan ou Castorama, quelques mots aimables ou quelque attention aux commerçants de la galerie, leurs déplacements par les transports en commun, si prodigieux pour le « vulgum pecus », mais si vulgaires pour les nantis dont ils sont.

La démocratie est-elle à inventer ? Non, elle a été oubliée et doit être redécouverte. Souvenez-vous, si vous avez une mémoire, de la phrase d’Edouard Herriot : « Soyez peuple » et appliquez-la, si vous êtes un  élu, car c’est votre devoir et votre survie. Ou alors ne vous étonnez pas que le peuple, lassé de vos attitudes hypocrites, se laisse séduire par les éternels démagogues de la révolution prolétarienne.

Et ces fauteurs de troubles, ces nouvelles « crapules staliniennes », comme disait dans une autre vie Daniel Cohn-Bendit, étaient là et revigorés au cours de cette campagne que vous leur avez abandonnée. Les Besancenot, les Buffet sont les vampires d’une société d’êtres humains abandonnés par vos politiques du chien crevé au fil de l’eau et qui se vendent au diable parce que seul le diable leur propose de sortir de l’enfer.

                                                                                                                                                Serge Weidmann